L-i-r-e
La grande section...
...ou le chemin vers le cours préparatoire (mais ceci est un secret qu'il ne faut pas révéler, la grande section est une classe à part entière, elle ne doit pas être reléguée au plan de classe préparatoire au cours préparatoire !).
Me voici donc heurtée à l'avancée (ou pas) des élèves sur le chemin de la lecture.
A ma première séance de phonologie, je me suis rendue compte que beaucoup d'éléments essentiels n'étaient pas acquis... Je me suis alors intéressée aux nombreux pré-requis nécessaires pour aborder la lecture en toute sérénité, sauf que pour certains, toutes ces notions ne sont pas assimilées, ce qui rend délicat l'assaut de la lecture. En découvrant l'étendue des connaissances à avoir sous le coude pour savoir lire, j'ai réalisé qu'en fait, la petite section est déjà une classe préparatoire au cours préparatoire...
Petit tour des pré-requis :
La psycho-motricité, la sensori-motricité : schéma corporel (conscience du soi, perception de ce qui entoure le corps de l'enfant, conscience du devant-derrière/haut-bas/droite-gauche), latéralisation (trouver sa main qui écrit), orientation dans l'espace, orientation dans le temps (premier-deuxième-troisième/avant-après...), activités sensori-motrice (perception visuelle, perception auditive, articulation ), coordination motrice, écriture...
Exemples en situation :
- "Tapons le mot 'bateau'."
"Ba - teau."
"Quelle est la première syllabe ?"
"Ba !"
"Très bien ! Quelle est la deuxième syllabe ?"
"..."
"Celle qu'on entend après la première ?"
" ... "
"Après 'ba' quoi..."
- Je montre l'étiquette du r écrit en cursive, on doit le retrouver sur l'affiche de l'alphabet en scripte, accrochée en hauteur. Un enfant me désigne vaguement le r sur l'affiche. Je feins de me tromper et demande vers où je dois diriger mon doigt pour tomber sur le r.
"A droite ou à gauche ?"
"Par là !"
Pas supra-précis... Donc quand on en vient à ça :
- Les p, q, b, d sont de bien belles lettres, mais quand il s'agit de ne pas les mélanger, c'est une autre histoire... Le p est formé d'un petit cercle auquel on colle un trait à gauche qui dépasse vers le bas tandis que le q coquin est lui aussi formé d'un petit cercle auquel on colle un trait qui dépasse vers le haut, mais on le colle à droite ! De quoi s'emmêler les pinceaux...
- Comment reconnaître à l'oreille un [i] d'un [y] (u, quoi), si on ne sait pas quelle forme prend la bouche quand on l'énonce ? Avec les élèves les plus en difficulté (suivi orthophonique hebdomadaire), je n'arrive pas à faire dire avec conviction que dans "bateau", on entend le son [a] dans la première syllabe et le son [o] dans la deuxième. C'est seulement quand je les fais exagérer l'articulation et porter l'attention sur le geste de la bouche qu'un déclic vient parfois. Dur dur...
La capacité de communication: niveau de développement du langage oral, désir de lire.
Le domaine affectif: sécurité, sécurité affective.
- Dans ma nouvelle tribu, j'ai principalement deux enfants qui sont encore très "bébés". Il faut arracher le moindre son de leur bouche, ce qui, à la longue est très fatigant, autant pour eux que pour nous. Ils n'osent pas se lancer, se tortillent dans tous les sens, cherchent le moindre indice dans la prunelle de mes yeux... Il leur manque un bon quota de confiance en eux pour se lancer.
Les aptitudes intellectuelles : compréhension du langage, aptitude à l'analyse et à la synthèse.
De grands mots pour de si petits bonshommes ! Mais beaucoup ont déjà compris comment fonctionne la machine à lire et s'amuse beaucoup à déchiffrer des mots simples.
Là vient le débat méthode globale/méthode syllabique/méthode mixte.
Pour ma part, je me sens bien plus proche de la syllabique et aussi bien plus à l'aise avec ce côté logique et systématique de la langue... Mais on y reviendra.