Introduction
Mon père sait bien raconter ses histoires. C'est qu'il en a beaucoup à raconter et elles sont intéressantes aussi. Il y met de l'intensité, nous tient en suspens, décrit le lieu, la chaleur, la musique. Il en rajoute sans doute un peu mais au final, nous sommes portés d'une péripétie à l'autre, excité par des événements qu'on a la sensation de vivre.
Ces deux dernières années, je les ai passées assise à mon bureau, sous la lueur de ma petite lampe orange, penchée sur le Hatier Histoire-Géographie majeure ou le Tavernier SVT ; m'escrimant contre des triangles rectangles avec mon compas et ma géorègle ; m'évertuant à faire et refaire des synthèses de français en deux minuscules heures... et bien d'autres activités ludiques et tout aussi trépidantes ! Autant dire que mes histoires à moi n'étaient pas passionnantes et que mes nouvelles fraîches avaient un vague parfum de réchauffé :
"Alors, quoi de neuf du côté de chez toi ?
- Ben en ce moment, je passe pas mal de temps en compagnie de Pythagore et de Louis XIV ! Le premier est barbant, le second est terrible...comme avant-hier...
- Ah..." = fin de la conversation.
Même si je me sais capable d'en raconter, ces deux années n'ont pas été les plus garnies de ma vie en événements dignes de l'être. Je trouve intéressant d'apprendre beaucoup de choses ; en me cultivant, j'ai l'impression de m'ancrer dans une nouvelle réalité. Mais comment rendre ceci intéressant quand globalement ressasser, bachoter, répéter vous frustre ? Quand, finalement, vous vivez pour avoir un concours et vous oubliez que vous le faites aussi (par dessus tout) pour être professeure des écoles ? Le concours devient l'objectif, obsédant.
Bien sûr, j'ai une vie personnelle, des centres d'intérêts, un amoureux, des amis. Je sors, je vois du monde, je m'active comme je peux. Mais ce concours a la faculté de nous ronger jusqu'à ce que seule la culpabilité nous guide... et elle ne nous guide pas bien loin ! Au bureau, au trot ! Je dis "nous" mais évidemment, ceci dépend du caractère de chacun. Il faut croire que le mien est programmé pour vivre cette situation de manière désagréable. Et nous sommes un certain nombre à être dans cette situation... Que ce qui sont dans la place lèvent le doigt ! (air connu)
J'ai aimé les études, maintenant, je veux aimer mon métier d'enseignante. Je me sens faite pour ça. Quand je suis dans une classe, je me sens vivre, investie d'une mission primordiale, avec des petits hommes qu'on prend à un point A et qu'il faut mener au point B quoi qu'il arrive. C'est un défi que je me sens prête à relever. Alors, donnez-moi ce concours, chers inspecteur, prof d'arts pla, conseillère péda ! Dites-moi OUI !
Il ne faut pas que je pense de trop à cette idée. Elle ne ferait qu'obscurcir le tableau. L'idée que je passe une troisième année à faire la même chose, je veux dire : préparer ce fichu concours. Je n'ai jamais redoublé au cours de mon cursus scolaire alors l'idée de tripler s'avère difficile à encaisser.
Mon objectif cette année est donc bien évidemment d'avoir enfin le CRPE (en Bretagne si possible). Mon sous-objectif (ça y est, les réflexes m'assaillent !) est de le préparer d'une manière différente des deux dernières années. Exit la rengaine !
Auto-biographie expresse de ces deux fameuses années :
J'ai passé ma première année en PE1, j'y ai suivi tous les cours, j'ai bossé intensément tous les soirs et les weekends pour suivre le rythme de la prépa. Ma note des écrits ne m'a pas permis d'aller au-delà : 94,5 pts, et il en fallait 98.
Lors de ma deuxième année de PE1 (j'ai eu la chance de redoubler), je n'ai suivi que les cours de maths et de français, ainsi que les préparations aux oraux. Les heures libérées m'ont permis de travailler différemment et efficacement, ce qui m'a permis d'accéder aux oraux cette fois, mais pas à l'admission : 176 pts, et il en fallait 186,5.
Apparemment, j'ai développé un style en deux ans. Le style de la fille qui y arrive presque mais pas encore tout à fait. Rassurant, la prochaine étape est celle de l'admission...